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#23 - La condamnation à mort des EdTechs chinoises
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#23 - La condamnation à mort des EdTechs chinoises

Ou quand un régime agit sans prendre de pincettes face à un secteur devenu trop omniprésent...

Mehdi Cornilliet
Aug 1, 2021
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#23 - La condamnation à mort des EdTechs chinoises
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Si en France, les concours représentent le meilleur moyen d’accéder aux institutions d’élite, en Chine, le simple accès à l’université est soumisau gaokao, équivalent du baccalauréat où il ne s’agit pas d’obtenir un 10 donné à (presque) tout le monde, mais d’obtenir des meilleures performances que les autres pour obtenir la meilleure université !

Mais comme en France, la réussite de ces concours conditionne une grande partie du devenir professionnel.

A tel point que les parents chinois dépensent des fortunes dans l’éducation de leurs enfants…

Film Friday: 'American Dreams in China' perfectly captures the Chinese  dream – SupChina
Affiche du film “American Dream in China” qui relate l’histoire des fondateurs de New Oriental Education, leader du marché du soutien scolaire en Chine

Ce qui n’a pas plu au Ministère de l’Eduation chinois qui a publié une note destinée à corriger ce que le Président chinois XI Jinping qualifiait de “maladie chronique”, à savoir les déboires de l’éducation en Chine.

Dans cette note, le point 13 est le plus important pour le secteur EdTech :

Adhere to strict examination and approval agencies. All regions no longer approve new subject-based off-campus training institutions for students in the compulsory education stage, and existing subject-based training institutions are uniformly registered as non-profit institutions. 

Toutes les EdTechs du marché K12 doivent désormais être des institutions… non-profit ! De plus, les cours de soutien pendant les week-ends et les vacances scolaires sont désormais tout simplement interdits. De quoi alléger la charge mentale d’une jeunesse qui vit pour intégrer la meilleure université... mais aussi les portefeuilles des investisseurs qui investissaient dans ces valeurs toutes passées à la guillotine !

Une décision motivée par des problèmes démographiques

La Chine fait face à une démographie déclinante. Moult observateurs jugent que le pays sera devenu vieux avant d’être riche.

Les chiffres sont sans appel : si la Chine comptait 17 millions de naissances en 2016, ce chiffre est tombé à seulement 12 millions en 2020. Une des causes principales est la hausse incommensurable des dépenses des parents en faveur de l’éducation de leurs enfants, qui représente 20% de leur budget total.

Alors que le gouvernement cherchait à tout prix la croissance et de l’efficacité depuis le début des années 2000, la folle hausse des inégalités a poussé le gouvernement à agir sans tarder contre l’une des premières causes de cette maladie chronique : les dépenses de soutien scolaire. Et ce, même si en 2016, il avait mobilisé plus de 30 milliards de dollars en faveur des EdTechs !

Ce marché, gangrené par un marketing fallacieux, représente aujourd’hui plus de 120 milliards de dollars en Chine. 75% des élèves de 6 à 18 ans en bénéficient !

Un marché EdTech chinois condamné à mort

La transformation de ces institutions en non-profit, Goldman Sachs estime que le marché ne représentera plus que 24 milliards de dollars… ce qui a amené la banque d’affaires américaine à réduire ses valorisations des entreprises du secteur de 78% en moyenne. Les leaders du marché perdront la majorité de leur business :

  • New Oriental, numéro 1 du marché, se voit ainsi privé de 62% de son business ;

  • le numéro 2 chinois, TAL Education, qui vient tout juste de se lancer dans des activités en-dehors de ce périmètre d’interdiction, perd quant à lui 80% de son chiffre d’affaires.

  • la fraude GSX TechEdu (devenue GaoTu) a été la plus sanctionnée, -98% depuis ses sommets absurdes atteints par les achats de Bill Hwang d’Archegos aka l’homme qui a perdu 20 milliards en 48 heures !

Under Siege, China's EdTech Giants Take Steps to Contain Fallout

Pour d’autres acteurs du marché, la sentence est similaire : toutes les valorisations ont plus que chuté. En guise d’exemple, la séance du 23 juillet a vu des milliards de dollars s’envoler :

Lire aussi :

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#4 Grandes promesses et fraudes : focus sur les EdTechs chinoises cotées en Bourse 🇨🇳
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2 years ago · 7 likes · Mehdi Cornilliet

Des investisseurs spoliés

Attirés par la poule aux œufs d’or que constitue l’éducation en Chine, les fonds d’investissement se sont rués sur les valeurs du marché, qu’elles soient encore privées ou cotées en Bourse :

Why China Is Cracking Down on After-School Tutoring: QuickTake - Bloomberg

Parmi les investisseurs figurent de très grands noms : Warburg Pincus, SoftBank (lire cette revue), Carlyle, DST, etc.

Leurs investissements ne valent désormais plus grand chose… Tout comme les tycoons milliardaires de la EdTech chinoise qui ont tous perdu ce statut.

Une sanction plus que logique pour des investisseurs qui espéraient profiter d’un marché en surchauffe au détriment de la santé mentale des étudiants.

Un rappel fécond aussi de la prééminence des critères ESG (Environnement, Social & Gouvernance) : investir dans l’éducation n’est pas une condition suffisante pour cocher toutes ces cases ! Si le discours ne suffit pas à convaincre, les pertes qui s’élèvent en milliards de dollars achèveront de ce faire.

Une solution efficace ?

Les parents sont-ils satisfaits de ces mesures ?

Pas du tout !

Comme le reporte cet excellent article du FT, le gouvernement propose désormais des activités animées par des professeurs du public.

Dans une douzaine de villes, les parents peuvent désormais confier leurs enfants dans des camps d’été sponsorisés par le gouvernement. La journée entière ne coûte que 60 renminbis (8€), repas inclus.

Une solution loin de convaincre les parents. En cause : les étudiants ne travaillent pas toute la journée. Les programmes incluent du sport et des divertissements, ce que les parents, parfaits adeptes des préceptes de Pascal, abhorrent.

Une cheffe d’entreprise témoigne après avoir payé 11 000 Rmb (1 430€) pour deux semaines de cours intensifs d’anglais et d’écriture, qu’elle préfère que son fils travaille au lieu de “bavarder avec ses camarades et jouer avec des pistolets à eau”…

Une mentalité de pression permanente qui semble aujourd’hui davantage défendue par les parents ayant envie d’envoyer leurs enfants dans les meilleures universités plutôt que de leur assurer un développement équilibré… Le secteur n’est pas (totalement) mort.

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Mehdi Cornilliet
@MCornilliet
CEO 2Empower

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